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grincheuxmarrant
23 mars 2012

Pourquoi Sarkozy est-il un Président si impopulaire ?

Les trois erreurs du Sarkozy président
Pourquoi Sarkozy est-il un Président si impopulaire ? C'est la question que se pose notre blogueur associé Elie Arié et tente d'y répondre à travers trois exemples.

 

(Footing de Nicolas Sarkozy avec son ex-femme Cécilia - WITT/SIPA)
(Footing de Nicolas Sarkozy avec son ex-femme Cécilia
 
Trois exemples (sans doute en existe-t-il d’autres) permettent de cerner la réponse à cette question – car elle la même dans chacun des trois cas :

1. Sarkozy a voulu dépoussiérer et désacraliser l’image présidentielle ; on pense, en particulier, à cette photo de lui en tenue de jogging sur les marches de l’ Elysée (difficile d’imaginer la même pour un de ses prédécesseurs...), manifestement inspirée par le jogging que fit Bill Clinton, encore Président, dans les rues de Paris, et qui lui avait valu tant d’éloges de la presse et de l’opinion publique pour une fois unanime (« enfin, un Président qui vit avec son temps ! ») ; ou encore à ce « Casse-toi, pauvre con ! » si mal perçu, alors que le « It’s economics, stupid ! » du même Clinton est partout cité en exemple du franc-parler intelligent.

Sarkozy n’a pas compris que les Français restent attachés à leur monarchie républicaine, et qu’ils n’acceptent pas de leur Roi-élu ce qu’ils admirent chez les Présidents simplement chefs d’Etat des autres démocraties : règle qui doit être tout aussi scrupuleusement respectée qu’elle ne doit être jamais énoncée.



2. Sarkozy a voulu désacraliser le rapport hypocrite et honteux que les Français entretiennent avec l’argent, en affichant son amitié avec les grands industriels, en fêtant sa victoire au Fouquet’s, et en augmentant d’emblée et officiellement son salaire de Président de 170%.

Ses prédécesseurs entretenaient tous des rapports tout aussi étroits avec des grands industriels et prenaient des repas dans des restaurants bien plus chers ; certains de ses concurrents à l’élection de 2012 ont annoncé qu’ils diminueraient le salaire présidentiel de...30%, c’est-à-dire qu’ils conservaient 140% de son augmentation obtenue grâce à Sarkozy.

Là encore, Sarkozy n’a pas compris qu’on ne peut pas bousculer impunément une hypocrisie collective si ancienne, héritage de tout un long passé religieux : on peut, comme Mitterrand, avoir sa table réservée au Fouquet’s, mais une victoire à l’élection présidentielle, ça se fête au Vieux Morvan, à Château-Chinon (où il n’a ensuite plus jamais remis les pieds).



3. Surtout, Sarkozy a voulu ouvertement adapter la France au monde de la globalisation économique dans lequel nous vivons, mais il a eu le tort de le dire ; d’autres l’ont sans doute fait bien davantage que lui : c’est Mitterrand qui a fait voter l’ Acte Unique Européen, instituant la libre circulation des capitaux, et le traité de Maastricht, instituant la monnaie unique et la Banque Centrale Européenne indépendante de tout pouvoir politique ; c’est Jospin qui a privatisé plus que tout autre gouvernement depuis la Libération, et qui a signé le protocole de Barcelone par lequel la France s’est engagée à porter l’âge minimum de la retraite de 60 à 65 ans, sans déclencher les mêmes manifestations de rue que lorsque Sarkozy l’a porté à 62 ans ; c’est Rocard qui a institué le bouclier fiscal (rendu indispensable par la création de l’ISF, pour éviter que certains contribuables ne payent plus de 100% de leurs revenus en impôts, ce qui aurait sans doute été anticonstitutionnel), que Hollande s’est engagé à rétablir (Sarkozy l’ayant supprimé en 2011), mais c’est Sarkozy qui, seul, en a subi tous les reproches, pour l’avoir abaissé de 80 à 50%, comme s’il en avait été l’inventeur.

Là encore, Sarkozy n’a pas compris que les politiques qui accentuent les inégalités, conséquence incontournable de la globalisation économique dans laquelle nous vivons, doivent être menées en catimini, sans les assumer ouvertement comme il a cru possible de le faire : si tous ses prédécesseurs (notamment socialistes) ont activement mené l’adaptation de la France au nouvel état du monde, c’est en respectant le mythe collectif de « la France antimondialiste » dans leurs discours : les Français sont comme ces enfants qui feignent encore de croire au père Noël et qui attendent de leurs parents qu’ils feignent de croire qu’ils y croient encore : il n’est pas facile de briser officiellement les rêves.


Dans ces trois exemples, on voit bien l’erreur, toujours la même, commise par Sarkozy : avoir négligé la valeur de la symbolique ; avoir ignoré que la forme compte au moins autant, sinon plus, que le fond ; et que beaucoup peut être fait à condition de ne pas le dire, voir de dire le contraire, même si personne n’est dupe ; avoir ignoré qu’il faut ménager officiellement la nostalgie encore trop vivante d’un monde disparu : et cette naïveté constitue bien une erreur politique.
source marianne
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grincheuxmarrant
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