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grincheuxmarrant
17 avril 2012

Dans la famille Muselier, la justice convoque Madame

Le député UMP des Bouches-du-Rhône Renaud Muselier le 07 septembre 2010 devant le siège de l'UMP
 
Le député UMP des Bouches-du-Rhône Renaud Muselier le 07 septembre 2010 devant le siège de l'UMP EnquêteAvocate auprès de l’office HLM de Marseille, la femme du député UMP pourrait être mise en examen pour «recel de prise illégale d’intérêt». Une conversation téléphonique accable la défense des Muselier.

Après s’être beaucoup occupée de la famille Guérini (et ce n’est pas fini), la justice marseillaise s’intéresse depuis quelques mois aux Muselier. Stéphanie Clément, avocate et épouse de Renaud Muselier, député UMP des Bouches-du-Rhône, est convoquée aujourd’hui par le juge d’instruction Franck Landou. Il enquête sur les marchés d’avocats et de communication de Marseille Provence Habitat (MPH), office HLM de la ville, dont Renaud Muselier est adjoint depuis 1995. Madame pourrait se voir signifier une mise en examen, notamment pour «recel de prise illégale d’intérêt». Avocate, elle traitait depuis 1995 de très nombreux dossiers d’impayés de loyers pour le compte de MPH. Les dossiers lui étaient d’abord attribués sans appel d’offres, puis un nouveau directeur général, ami et ancien collaborateur de Muselier, aurait ordonné (avant passation des appels) que l’épouse récupère 60% des dossiers (Libération du 6 mars). Une enquête de la Mission interministérielle d’inspection du logement social a révélé les irrégularités, une information a été ouverte et un premier avocat mis en examen la semaine dernière, tout comme l’ex-directrice générale de l’office. L’épouse de Renaud Muselier devrait suivre cet après-midi.

«Flambante». Afin d’éviter que l’affaire n’éclabousse l’élu UMP, Xavier Cachard, un ami avocat, a organisé une conférence téléphonique pour préparer la défense, avec trois proches du député, dont Jean-Luc Ivaldi, directeur de l’office HLM. Ce dernier, comme c’était assez prévisible, avait été placé sur écoute. Et le compte-rendu détaillé de la discussion dit beaucoup, en creux comme en relief, du rapport à la justice dès lors qu’elle s’intéresse aux affaires d’élus. L’avocat commence par expliquer aux trois autres qu’il a rencontré l’épouse de Renaud Muselier, que pour une fois elle était moins «flambante» (Xavier Cachard est un ami très proche de Muselier, qui est séparé de sa femme depuis près d’un an). Il lui a expliqué l’affaire, lui a dit que c’était « relativement imparable». A l’époque, il ne savait pas encore que l’information judiciaire sur les marchés de MPH était ouverte. Il pensait qu’il ne s’agissait que d’une enquête préliminaire, préférait qu’elle ne réponde pas à la convocation qu’elle venait de recevoir des enquêteurs. «Ils oseront pas envoyer la PJ la chercher», pensait-il. Une audition aurait risqué de rendre l’affaire publique. «A quatre mois des législatives, c’est moyen.»

L’avocat préférait essayer de rencontrer discrètement un magistrat en charge des affaires financières au parquet de Marseille. Mais dans un couloir du palais de justice, raconte-t-il, il tombe sur un vice-procureur. «Un jeune requin, jeune loup, assez particulier», dit-il. L’un des participants à la conférence téléphonique lui demande de préciser : «Un peu particulier, ça veut dire PD ?» Non, non, répond l’avocat, particulier ça veut dire, pour lui, que le vice-procureur est «indiscutablement à gauche. Un type compliqué quoi…» D’autres magistrats en prennent pour leur grade. Le juge d’instruction chargé du dossier ? Un «grand mou tout con». Le procureur de la République, qui a ouvert l’information ? «Une espèce de bordillasse.» Hier, Renaud Muselier a indiqué à Libération qu’il «condamne» ces propos tenus par ses «collaborateurs». L’avocat explique encore au vice-procureur qu’il préférerait que l’épouse «ne soit pas auditionnée». S’ensuit une discussion «tendue», que Xavier Cachard résume ainsi : «C’est pas : "On va arranger ça maître, asseyez-vous, vous inquiétez pas, je déchire les PV et tout."» Non, le vice-procureur lui apprend qu’une information est ouverte, et il glisse dans la discussion, informelle, qu’il trouve étonnant que l’on retrouve l’épouse de Muselier comme avocate de l’office HLM de la ville, et l’épouse de Jean-Noël Guérini, avocate de l’office HLM du département (lire page suivante). «Ils se placent sur le côté moral», résume l’avocat. Qui semble relativement à l’abri de ce genre de posture.

La conférence téléphonique permet en effet de découvrir qu’avant de venir défendre la cause de Mme Muselier, il était venu apporter un «argumentaire» à la justice contre Martine Guérini pour le même type de faits.

Charretier. Comparé à l’affaire qui vise le président du conseil général, le dossier Muselier est encore un peu léger. Mais les écoutes révèlent quelques points communs. Un même langage de charretier pour parler de la justice, et une grande imprudence au téléphone, signe peut-être d’un très fort sentiment d’impunité. Ainsi, l’avocat de Muselier organise le ménage pendant la conférence téléphonique. Il explique qu’il faut «prévenir tout le monde», qu’une perquisition risque d’être menée, qu’il fera peut-être «un saut» à l’office HLM pour «voir un peu les pièces», sous-entendu avant que la justice ne passe par là. Chez Guérini, on enlève les ordinateurs, c’est plus expéditif. Dans le fil de la discussion, l’avocat lâche aussi quelques arguments accablants pour l’épouse. Il explique que Marseille Provence Habitat vient de demander à son cabinet d’analyser une décision de Stéphanie Clément. «Enfin n’en parlez surtout pas, hein», glisse-t-il avant d’ajouter qu’au service juridique de MPH, on évite de donner les dossiers «un peu compliqués» à Mme Muselier. Ennuyeux pour le cabinet qui trustait une bonne partie des contentieux d’impayés.

La mise en cause de l’épouse inquiète beaucoup l’avocat et les proches. «C’est plus rigolo du tout là, dit Xavier Cachard. […] La femme de Muselier mise en examen pour violation de marchés publics… ah on est pas dans la merde…» Un chargé de communication renchérit : «Y’a le monde entier qui va avoir accès à l’information. […] Les autres y vont nous vomir dessus en nous expliquant que, super, le chevalier blanc, youpi quoi.» Puis le chargé de com passe aux choses pratiques. «Sous quel angle on organise la défense pour éviter de faire les conneries à la MAM [Michèle Alliot-Marie, ndlr], les conneries à la Guérini, enfin les erreurs de com que tu fais au début et qui te plombent pour la suite ?» Quand les quatre hommes raccrochent, la connerie est faite, bientôt consignée sur procès-verbal.

source liberation

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